Les maladies inflammatoires de l’intestin (MII) sont des maladies chroniques dans lesquelles le système immunitaire attaque par erreur l’intestin, et déclenche ainsi des symptômes comme des douleurs abdominales, des diarrhées et une perte de poids due à l’inflammation. Le plus grand défi de la recherche sur la maladie de Crohn et la colite consiste à résoudre le mystère de sa ou ses causes exactes.
L’état du microbiome intestinal est un facteur potentiel faisant actuellement l’objet d’études — le microbiome est une communauté diversifiée de bactéries qui peuple le tube digestif; une diversité comparable à celle que l’on trouve dans les forêts tropicales. Ces bactéries intestinales jouent un rôle crucial dans les fonctions de santé quotidiennes, notamment en facilitant la digestion des fibres tenaces et en régulant le système immunitaire. Avec les maladies comme la maladie de Crohn et la colite, on observe souvent une réduction de la diversité des bactéries intestinales saines, ce qui équivaut à la disparition d’insectes essentiels dans la forêt tropicale : ce processus est connu sous le nom de dysbiose (Fischbach et al., 2016). La disparition de certaines bactéries saines dans l’intestin entraîne la prolifération de bactéries nocives, ce qui peut donner lieu à la maladie de Crohn ou à la colite. Mais on ne sait pas encore quelles sont les bactéries spécifiques impliquées dans ce processus.
Il est donc encourageant de constater que les récents progrès effectués dans les domaines de la technologie et de la recherche permettent d’identifier des bactéries pouvant être utilisées pour le diagnostic et le traitement. Voici le résumé d’une étude de recherche encourageante publiée par l’équipe du docteur Wine dans le journal, Microbiome.
L’étude commence par le système immunitaire qui se compose de cellules immunitaires — les cellules B et les cellules T. Les lymphocytes B « de reconnaissance » se déplacent dans le corps et produisent des immunoglobulines (ou des « balises moléculaires ») qui se lient aux substances étrangères présentes dans le corps et les identifient. Ces molécules agissent en guidant le deuxième type de cellules immunitaires, les cellules T « tueuses », vers les cellules étrangères. Une fois que le lymphocyte T a trouvé sa cible, il phagocyte la cellule étrangère identifiée et l’élimine. Parmi les deux types d’immunoglobulines présentes dans les intestins — l’immunoglobuline A (IgA) et l’immunoglobuline G (IgG) –– les IgG signalent les substances étrangères, y compris les bactéries nocives, afin que les cellules T « tueuses » sachent lesquelles éliminer. Le niveau d’IgG dans les intestins des patients atteints de la maladie de Crohn ou de la colite est plus élevé.
Pour étudier le rôle des IgG, le docteur Wine et son équipe se sont penchés sur la capacité de différentes bactéries (isolées des intestins d’enfants atteints de la maladie de Crohn et de la colite) à provoquer une inflammation. Certaines sont liées à l’immunoglobuline G (IgG) et d’autres non (Armstrong et al., 2019). Ils ont découvert que les microbes étroitement liés aux IgG étaient plus susceptibles d’enflammer les intestins des enfants atteints de la maladie de Crohn ou de la colite. Le docteur Wine et ses collègues suggèrent que lorsque les bactéries intestinales se lient aux IgG, elles fonctionnent comme des indicateurs qui peuvent aider les professionnels de la santé à identifier les mauvaises souches responsables de la maladie de Crohn et de la colite. Les chercheurs espèrent que les IgG pourront être utilisées comme des marqueurs de bactéries nocives dans les intestins des personnes atteintes de la maladie de Crohn ou de la colite. Les IgG peuvent également être utilisées pour développer des diagnostics et des traitements en ciblant les bactéries qui incitent le système immunitaire à provoquer une inflammation.
Comment cette découverte est-elle liée à l’étude GEM?
L’étude GEM identifie de nouvelles causes et déclencheurs de la maladie de Crohn et de la colite, qui peuvent aller de certains gènes, à des types de bactéries en passant par certains choix de mode de vie chez les personnes présentant un risque de maladie de Crohn et de colite. Cette étude menée par l’équipe du docteur Wine explore comment un déclencheur spécifique, dans ce cas, les bactéries associées aux IgG, repère les bactéries nocives et la manière de l’utiliser comme un outil de diagnostic potentiel. Cette initiative est un excellent exemple de recherche universitaire qui améliore la qualité de vie des personnes atteintes de la maladie de Crohn ou de la colite.
Références
Fischbach, M. A., & Segre, J. A. (2016). Signaling in Host-Associated Microbial Communities. Cell, 164 (6), 1288 – 1300. https://doi.org/10.1016/j.cell.2016.02.037
Armstrong, H., Alipour, M., Valcheva, R. et al. (2019). Host immunoglobulin G selectively identifies pathobionts in pediatric inflammatory bowel diseases. Microbiome 7, 1. https://doi.org/10.1186/s40168-018-0604-3